LE JOURNAL DE TYLER DANS REMEMBER ME
Writer and illustrator: teamwork today !
L’écrivaine et l’illustratrice : travail en équipe aujourd’hui !
Today I’ve thought of a new kind of post. The idea was to make an illustration and to ask a friend to write a short text about it. The theme we chose turned out to be Tyler’s Journal. I’ve made the drawing and my friend jessegirl, who has already contributed to this blog, has written this lovely, deep, insightful piece about the meaning and role of Tyler’s journal, based on my drawing. It’s been wonderful to work together and I hope we will be able to give you some more posts like those in the future !
Aujourd’hui j’ai imaginé un post un peu inédit. L’idée était de créer une illustration et de demander à une amie d’écrire un court texte en s’inspirant du dessin. Le thème que nous avons choisi s’est révélé être le Journal de Tyler. L’illustratrice, c’est moi, et l’écrivaine, c’est mon amie jessegirl, qui a déjà contribué à ce blog, et qui a écrit ce beau texte profond et perceptif sur la signification et le rôle du journal de Tyler, en s’appuyant sur mon illustration. Travailler ensemble été une grande joie et j’espère que nous pourrons vous proposer d’autres posts sur ce principe à l’avenir !
Tyler's Journal
Le Journal de Tyler
-by/par jessegirl. June 4, 2010/Le 4 juin 2010
Le fait de tenir un journal peut être considéré comme un moyen de se confronter à un deuil. Le deuil engendre une introspection, qui, à son tour, fait appel à l’écrit pour valider ce qui ne peut être dit à voix haute. Après la mort d’un être aimé, nous éprouvons le besoin de communiquer avec celui qui nous a quitté, et aussi avec nous-même. Si nous possédons un talent artistique, tel que la musique ou un art visuel, c’est sans doute le véhicule que nous utiliserons pour exprimer l’inexprimable. Mais pour ceux qui ne sont gère doués dans ces domaines, ce sont les mots qui devront remplir cette fonction, les mots qui devront suffire. Et c’est pour raison que Tyler «parle» à Michael. Il écrit un journal.
In general, we can say that journaling is a way of coping with loss. Loss provokes introspection, which, in turn, uses the written word to acknowledge what cannot be spoken. One must, after the death of a loved one, communicate with that one, and with oneself. If one has an artistic outlet, music or visual art, that might be the route one takes, to express the inexpressible. But for those with few skills in those areas, words must do, must be enough. And so, Tyler ‘talks’ to Michael. He journals.
© Copyright LittleSeaSparrow (me/moi !)
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Spontanément, le journal de Tyler me paraît répondre à trois objectifs qui se fondent les uns dans les autres. Ce sont la nécessité pour lui d’accomplir son travail de deuil pour surmonter la tragédie, son besoin de disposer d’un espace secret pour se livrer à cette tâche, et son besoin de rendre un hommage et un tribut à son frère.
Off the top, I’ve thought of three purposes for Tyler’s journal and they bleed into each other. They are Tyler’s need to process the tragedy, his need for privacy while doing so, and his need to honour and pay tribute to his brother.
Processing
Le travail de deuil
Nous avons eu besoin de réfléchir, de discuter et de blogger après avoir vu ce film.
We needed time to think, to discuss, and to blog after we saw this film.
Tout cela a permis au film de s’insinuer et de demeurer en nous pendant qu’il faisait son travail d’alchimie. De la même façon, Tyler a besoin de son journal, pour faire face à son deuil, pour réfléchir et pour comprendre, et en définitive, pour parvenir à pardonner Michael. Le journal est un moyen pour lui d’accomplir ce périple. La douleur est un périple.
This allowed it to seep into us and then to sit inside us, while doing its alchemical work. So Tyler needs the journal, to process his loss, to ponder and help him understand, and ultimately forgive Michael. The journal is the way to make the journey. Grief is a journey.
Alors que Tyler se positionne en simple auditeur libre de sa vie – dans ses études, dans son travail, dans ses relations – il s’investit par contre totalement dans sa vie intérieure. Là, il étudie sans relâche, jusqu’à l’épuisement, il se soumet continuellement à des tests, et sa réflexion porte toujours sur ce qui gît au plus profond de lui. C’est dans ce lieu que Michael doit s’être rendu ; dans ce lieu que nous allons rechercher le sens de la vie et, selon ce que nous y découvrons, que nous décidons de nos actes. Tyler, lui aussi, doit creuser en lui-même et agir en fonction de qu’il trouvera. C’est aussi un lieu effrayant, semblable au monde souterrain des enfers.
While Tyler merely audits his outer life—school, job, relationships—he engages fully in his inner life. There, he takes on gruelling studies, constantly testing himself, always pondering at the deepest level. That’s the place Michael must have gone, to the place where one goes to find the meaning of life and to act on what one finds there. Tyler, too, has to delve into himself and act on what he finds there. And it is one scary place, like the underworld.
Dans ce lieu, Tyler doit retrouver Michael et, comme tout ceux qui partent en quête dans le monde des morts, Tyler a peur. Il sait seulement qu’il doit trouver son frère, lui crier toute sa rancœur, le questionner, obtenir des réponses, pleurer pour lui, l’aimer et le pardonner. Tyler sait tout cela, et la tâche est impressionnante à l’extrême. C’est le grand inconnu, et Tyler s’y rend avec pour seule crainte la peur de ne pas être capable d’en revenir. C’est un labeur atroce, comme une plaie béante que l’on doit élargir encore plus, qui met à nu ses pires terreurs.
Tyler has to find Michael there and like any seeker in the place of the dead, Tyler is afraid. He knows only that he must find his brother, rail against him, question him, find answers, cry for him, love him and forgive him. Tyler knows all that and it is extremely daunting work. It is the great unknown, and Tyler goes there fearing only that he might not be able to return. And it is excruciating work, like cutting an open wound, exposing his worst terrors.
Tyler fait cependant ce voyage. Il n’a pas d’autre choix. Il y est obligé. Il doit se faire son propre passeur pour descendre dans les profondeurs de son âme, explorer, trouver des réponses ou un semblant de résolution, puis remonter à la surface. Ou mourir. Telle est l’exacte importance de son itinéraire . C’est une question de vie ou de mort.
Tyler goes anyway. He has to. He is compelled. He must ferry himself down into the depths of his soul, explore, find answers or some resolution, and then come back up again. Or die. It is exactly that significant. It is a matter of life and death.
Et ensuite, lorsqu’il reviendra, s’il revient, il sera transformé. Rien de moins ne permettra à Tyler de revenir et de participer de nouveau à la «vraie vie». Le journal est son outil, son stylo est la pioche qui va creuser ces recoins intimes de son âme pour qu’il puisse les exposer à la lumière. A ce stade de sa douleur, il a besoin de ce journal autant qu’il a besoin de respirer. Avez-vous remarqué comme il l’emporte partout avec lui, comment il en attache les pages terminées à l’aide d’élastiques, et que le journal est là avec lui dans le bureau de son père le jour fatidique ?
And when, or if, he returns, he will be transformed. Nothing short of that will allow Tyler to return and engage in ‘real life’ again. The journal is his tool, his pen the pick axe which will excavate these inner recesses of his soul so that he can bring them to light. At this point in his grief he needs that journal like he needs air. Have you noticed how he carries it around with him, how he secures previous pages with elastic bands, how it is there with him in his father’s office that day?
Tyler carries the diary in his pocket in the cemetery scene.
Tyler a le journal dans sa poche dans la scène du cimetière.
Rolled pages of the diary
Tyler fait des rouleaux pour archiver son journal
In Charles' office
Dans le bureau de Charles
Privacy
Secrets
Nous ne savons pas ce que contient le journal sauf lorsque nous entendons la voix off de Tyler, par exemple lorsqu’il s’adresse à Michael à propos du mythe de castration du père, ou lorsqu’il dit à Ally qu’il avait besoin de parler d’elle à «quelqu’un». Aidan ne lui pose pas de questions, ou probablement, n’a pas envie de savoir. Janine, sur le ton de la plaisanterie, lui demande s’il est en train d’écrire quelque chose de méchant sur elle, mais avec respect, elle n’essaie pas vraiment de lui tirer les vers du nez.
We don’t know what is in the journal except when we hear Tyler’s voice over, for example, when he addresses Michael about the son castrating the father, or when he tells Ally he needed to tell ‘someone’ about her. Aiden doesn’t ask, or, probably doesn’t want to know. Janine jokingly wonders whether he’s writing anything bad about her, but respectfully, she doesn’t really pry.
Comme c’est le cas pour la plupart des journaux intimes, celui de Tyler est très secret. Pouvoir le lire serait comme de pouvoir lire non seulement ses pensées, mais aussi son âme. Tyler est attablé au café, dont il est un habitué, et le serveuse lui apporte une assiette en lui ordonnant de «manger». Mais on ne pense pas à de telles choses, comme le fait de se nourrir, lorsque l’on tient un journal comme il le fait. Le temps s’envole sans que l’on s’en aperçoive, parce que l’on est totalement absorbé. Le monde qui vous entoure, même dans un café bruyant, empli du brouhaha des conversations, des allées et venues des clients, du cliquètement des couverts et des plats, et de la cacophonie des bruits venus de la rue, tout cela n’est qu’un brouillage de fond. On n’entend pas, on ne voit rien de tout cela. Nous sommes alors comme Tyler, dans le monde inférieur des enfers avec son frère, tâtonnant dans l’obscurité, espérant entendre son chant, et résonner les cordes de sa guitare. Comme lui, nous sommes dans un monde secret. Ce monde est notre monde réel et le monde extérieur s’efface et se brouille.
As with many diary-type journals, Tyler’s is very private. Getting a good look at it would be getting a look at not just his thoughts, but also his soul. He sits there in the diner, a regular, and the waitress brings him something and instructs him to ‘eat’. You don’t think of things like eating when you journal that way. Time gets away from you because you are totally absorbed. The world around you, even in a busy diner, with people talking, coming and going, with the noises of cutlery and dishes, with the cacophony of sounds from the city street intruding, all is just white noise. You don’t hear or see it. You are in the underworld with your brother, groping in that dark, hoping you can hear his song, him strumming his guitar. You are in a private world. That is your real world and the outer one recedes in a blur.
J’ai toujours pensé que l’intrusion de Neil Craig dans le journal d’Ally et dans celui de Tyler s’apparentait à une violation, quelle qu’ait été son intention première. Imaginons Tyler rentrant chez lui et trouvant Craig non seulement installé dans son appartement, non seulement dans sa propre chambre, mais lisant son journal, au cœur de sa vie la plus intime. Combien de pages du journal Neil a-t-il lues ? C’est une question que je me suis toujours posée. Que sait-il au juste du ressentiment de Tyler, de ses pensées et de ses émotions secrètes, formulées sans inhibition et sans censure comme elles le seraient naturellement dans un journal ? Tyler doit avoir été mortifié que cet adversaire ait ainsi violé son intimité de cette façon, que cet homme ait vu son âme, sa blessure.
I’ve always thought that Neil Craig’s intrusion into both Ally’s journal and Tyler’s was violation, never mind its purpose. Imagine Tyler coming home to find Craig not just inside his home, not just inside his bedroom but inside his journal, inside his most private life. How much did he read, I always wonder? How much does he know of Tyler’s ranting, his secrets thoughts and feelings, all uninhibited and uncensored as they would be in a journal? For this adversary to violate his privacy like that must have mortified Tyler. For this man to see his soul, his wound.
Car en effet, ce journal ne contient en toute probabilité que des choses qui doivent être partagées qu’entre Tyler et son Dieu. Le journal est le sein maternel dans lequel doit s’opérer la transformation de Tyler. Il contient le fragile embryon qui doit y rester caché jusqu’à ce qu’il soit capable de survivre à la lumière du jour. Il ne contient rien moins d’autre que la vie nouvelle qui émergera du chagrin de Tyler. Telle est toute la puissance de ce journal.
For in that journal would be things only meant to be between Tyler and his God. The journal is the womb for Tyler’s transformation. In it is the fragile embryo which must stay hidden until it can survive the light of day. It contains nothing less than the new life which will come out of Tyler’s grief. It is that powerful.
Honouring
Hommage
Enfin, le journal est un lieu d’hommage. C’est le lieu où le souvenir de Michael est concrétisé et conservé. Nous honorons ceux que nous avons perdus de bien des manières, par des actes et des rituels de révérence. Nous gravons leurs noms dans le granit des pierres tombales, nous créons des vidéos et d’autres souvenirs visuels, et ainsi de suite. Nous nous racontons des histoires qui parlent d’eux. Instinctivement, nous savons que nous ne devons jamais oublier.
Finally, the journal is a place of honour. It is where the memory of Michael is realized and stored. We honour lost loved ones in various ways, with reverent acts and rituals. We etch their names onto granite on grave stones, create videos and other visual memorials, and so on. We tell each other stories. We know, instinctively, that we must never forget.
J’ai déjà exprimé l’idée qui suit, à une autre occasion. Tyler est la clef de voûte, il nous conduit vers le type de souvenir que nous avons tous besoin de cultiver. Le film nous emmène dans ces profondeurs intérieures de nous-mêmes que nous avons besoin de découvrir pour pouvoir devenir plus entièrement humains. C’est pour cette raison que nous ne pouvons chasser ce film de nos esprits. L’exploration de ces lieux intérieurs peut être douloureuse, mais une telle excavation est nécessaire. «Il est important de le faire, parce que personne d’autre ne le fera». Et personne d’autre ne le fera de la même façon que nous.
I’ve said this before, elsewhere. Tyler is a touchstone, leading us to the kind of remembrance we all need to cultivate. The film leads us to those deep places within ourselves which we need to find, in order to become more fully human. That’s why we can’t get this film out of our heads. Exploring those places within ourselves can be painful, but this excavation is necessary. “It is important that you do it, because nobody else will.” And no one else will do it the way you do it.
Il est significatif qu’après la mort de Tyler, nous apercevons dans les cendres les restes de son journal. Le journal a accompli le travail qu’il devait faire pour Tyler, mais, à travers ce journal, Tyler continue de parler. Tyler savait, à la fin, que son frère pouvait l’entendre, et c’est pourquoi il lui dit ces choses qui sont les plus importantes de toutes :
« Je t’aime. Tu me manques...Et je te pardonne».
It is significant that after Tyler dies, what we see in the ashes is the remains of his journal. It did its work for him, but through it, he still speaks. He knew, in the end, that his brother could hear him, so he told him the most important things:
“I love you. I miss you...And I forgive you.”