Remember Me et la mort : pourquoi avons-nous envie de revoir le film ?
Death in Remember Me : why do we repeat RM viewings ?
Il y a de cela quelques semaines, dans notre forum de discussion, nous nous somme aperçues que nous étions nombreuses à être des récidivistes. Nous étions retournées voir le film plusieurs fois ; beaucoup sont en fait allées le voir 3, 4, 5 fois, plus… c’était presque un besoin. Nous n’arrivions pas à comprendre pourquoi nous répétions l’expérience. Nous savions que ce n’était pas seulement à cause de Rob : le film est si profondément imprégné de tristesse et de chagrin, et sa fin est tellement douloureuse qu’il aurait du avoir l’effet inverse : nous ne sommes pas masos, alors est-ce que nous n’aurions pas dû plutôt détaler du ciné en essuyant une larme et en nous jurant bien de jamais aller le revoir, ce film ? Pourquoi revenir, alors que certaines d’entre nous avaient visiblement du mal à faire face à la tristesse qu’il engendre ?
Certaines de celles qui ont commenté ont dit qu’elles avaient en fait envie de revoir le film une seconde fois, mais qu’elles hésitaient à l’idée de devoir subir à nouveau la fin ou de devoir une fois de plus l’accepter.
Je n’ai pas échappé au syndrome de répétition, j’ai continué à aller le revoir maintes fois (je ne dirai pas combien), mais en même temps je continuais à ruminer le problème. Pourquoi est-ce que je retournais voir ce film alors que la fin, chaque fois, me faisait un terrible coup au cœur ? Qu’est-ce qui m’arrivait, qu’est-ce qui nous arrivait à tous ? Finalement, j’ai élaboré ma petite théorie personnelle, et les réactions que j’ai obtenues après l’avoir postée sur le forum montrent qu’elle semble valide, du moins pour certaines d’entre nous. Cela dit, ce n’est qu’une hypothèse, pensée avec le cœur.
This is one of Caroline's portraits of Tyler from the film/Portrait de Tyler par Caroline dans le film
Certaines de celles qui ont commenté ont dit qu’elles avaient en fait envie de revoir le film une seconde fois, mais qu’elles hésitaient à l’idée de devoir subir à nouveau la fin ou de devoir une fois de plus l’accepter.
Je n’ai pas échappé au syndrome de répétition, j’ai continué à aller le revoir maintes fois (je ne dirai pas combien), mais en même temps je continuais à ruminer le problème. Pourquoi est-ce que je retournais voir ce film alors que la fin, chaque fois, me faisait un terrible coup au cœur ? Qu’est-ce qui m’arrivait, qu’est-ce qui nous arrivait à tous ? Finalement, j’ai élaboré ma petite théorie personnelle, et les réactions que j’ai obtenues après l’avoir postée sur le forum montrent qu’elle semble valide, du moins pour certaines d’entre nous. Cela dit, ce n’est qu’une hypothèse, pensée avec le cœur.
This is one of Caroline's portraits of Tyler from the film/Portrait de Tyler par Caroline dans le film
A few weeks ago, while discussing RM in our French forum, we discovered that many of us were repeating viewers . We wanted – no, needed- to see the film again and again, and some of us even saw the film up to 5 times, sometimes more…We couldn’t figure out why we kept coming back. It wasn’t just all about Rob, we were well aware of it – the film is fraught with sadness and sorrow and the ending is so painful that it should have had the opposite effect –shouldn’t we have run away crying from the theater and sworn never to see that film again? So why did we keep coming back when some of us obviously found it hard to cope with all the sadness?
Some of the commenters mentioned they did wish to see the film a second time but were hesitant, because it was hard for them to go through the ending all over again or to accept it.
It wasn’t different for me - I kept repeating viewings but I also kept mulling the problem over. Why was I coming back when the ending hurt me so much every time? What was happening to me, to all of us? I finally came up with a little theory of my own – and the feedback I got seems to show that it’s working, at least for some of us. So here it is, such as it was posted on the forum, for what it’s worth.
Le fait de retourner voir le film est un moyen d’échapper à la mort de Tyler, et à la mort en général, on reprend l’histoire de zéro et on revit toutes les scènes heureuses. Même si on sait qu'on va devoir repasser par la fin atroce, malgré tout en y retournant, on se donne le pouvoir de faire "revivre" Tyler, c'est un moyen de dire "ce n'est pas une mort pour de vrai". Chose qu'on ne peut évidemment pas faire dans la vraie vie. Bref, c'est un moyen d'échapper au côté définitif de la mort. On rembobine et, de nouveau, après le terrible écran noir, la voix off et le journal qui palpite dans les cendres, on retourne au début, et ouf, il est de nouveau là à la fenêtre de sa chambre, à fumer sur l'escalier de secours, avec son tee-shirt orange enfilé à l'envers (quelqu'un a remarqué ? on voit les coutures et l'étiquette !!), on revoit ses yeux bleus... et ainsi de suite et ainsi de suite, on recommence, et on échappe ainsi au traumatisme de la mort.
C'est quelque chose qui peut fonctionner avec d'autres films qui finissent tragiquement, j'ai une copine qui regardait autrefois Titanic en boucle par exemple. C'est une réaction très humaine.
En même temps, c'est paradoxalement un moyen d'absorber le fait que la mort est définitive: on essaie d'y échapper en revoyant le film, mais comme on retombe inévitablement toujours sur cette fin, on finit par commencer lentement à l'accepter, l'idée de la mort fait son chemin, c'est un apprentissage.Je suis persuadée que RM possède de très nombreux niveaux de lecture, qu'on perçoit différemment selon son âge, son vécu, ses propres deuils. C'est un petit film faussement innocent qui est en fait très profond. Pour moi les critiques qui ont superficiellement décrit le personnage de Tyler comme tourmenté, rebelle, paumé, etc., sont misérablement restés à la surface. Pour moi, c'est avant tout un jeune homme en deuil, une âme en peine qui ne surmonte pas le suicide atroce de son frère (c'est lui qui l'a retrouvé pendu ! imaginez-vous cela !) et qui cherche du mieux qu'il le peut un moyen de gérer cette souffrance (en écrivant constamment dans son journal et en s’adressant à son frère mort, par exemple). On pourrait trouver plein d'autres titres pour le film, et pour moi, si je devais lui en réinventer un, ce serait Le jeune homme et la mort. Une autre de mes amies a pensé à Une vie inachevée.
C'est quelque chose qui peut fonctionner avec d'autres films qui finissent tragiquement, j'ai une copine qui regardait autrefois Titanic en boucle par exemple. C'est une réaction très humaine.
En même temps, c'est paradoxalement un moyen d'absorber le fait que la mort est définitive: on essaie d'y échapper en revoyant le film, mais comme on retombe inévitablement toujours sur cette fin, on finit par commencer lentement à l'accepter, l'idée de la mort fait son chemin, c'est un apprentissage.Je suis persuadée que RM possède de très nombreux niveaux de lecture, qu'on perçoit différemment selon son âge, son vécu, ses propres deuils. C'est un petit film faussement innocent qui est en fait très profond. Pour moi les critiques qui ont superficiellement décrit le personnage de Tyler comme tourmenté, rebelle, paumé, etc., sont misérablement restés à la surface. Pour moi, c'est avant tout un jeune homme en deuil, une âme en peine qui ne surmonte pas le suicide atroce de son frère (c'est lui qui l'a retrouvé pendu ! imaginez-vous cela !) et qui cherche du mieux qu'il le peut un moyen de gérer cette souffrance (en écrivant constamment dans son journal et en s’adressant à son frère mort, par exemple). On pourrait trouver plein d'autres titres pour le film, et pour moi, si je devais lui en réinventer un, ce serait Le jeune homme et la mort. Une autre de mes amies a pensé à Une vie inachevée.
Repeated viewings of the film are a way of escaping from Tyler’s death and from death itself. The story rolls back to the beginning, you start from scratch again and you are given the chance to live through all the happy moments again. Even if you know that you will eventually have to go through the devastating ending all over again , somehow, you receive the power to resuscitate Tyler, pretending that he didn’t die for real. Obviously, this is not something you can do in real life. So – seeing the film again is our way of escaping the utter finality of death. The gut-punching black screen – Tyler’s last voice-over – the diary with its soiled pages fluttering like a beating heart in the ashes – all that is gone, if you so wish. All you have to do it press the Rewind key (or buy a new ticket) –and it’s like a miracle, life starts over again, and there you have him: handsome and slightly hung-over Tyler sitting on the fire escape stairs, smoking his cigarette and peering at us, framed though his bedroom window. He’s wearing that orange-red T-shirt again – by the way, has anyone noticed that he’s wearing it inside out ? you can see the seams and the white label -, and gazing at us again with his clear blue eyes... and so on and so on, you can start over endlessly, and ultimately escape the trauma of death.
This kind of stratagem works well with other films which also have a tragic ending – one of my friends used to do just that with Titanic long ago. It is after all a very human reaction.
And yet, the paradox is that repeated viewings are also a way of understanding that death is forever. For a time, you try to escape from that truth, going back and back and back again to see the film, but, as the ending inevitably grows nearer, the idea of death slowly begins to sink in. Little by little, you begin to accept its inevitability.
I am convinced that RM is built of multiple layers of meaning and that we understand them differently, according to our age, our experience and our own losses. The seeming innocence of this little film hides unexpected depths. Critics who lightly dismissed the character of Tyler as a young, drfiting and tormented rebel only pitifully skimmed the surface. This is not what he really is. He is a grieving young man, a lost soul, unable to get over the devastating suicide of his brother. He was the one who found Michael after Michael hanged himself. Can anyone imagine the impact? Tyler is struggling to find a way to cope with the pain and grief – this is why we see him constantly scribbling away in his diary, talking to his dead brother. I’ve always thought we might have coined many other different titles for Remember Me. If I were to invent one, I would rename it Death and the Young Man. Another friend of mine came up with another title : An Unfinished Life.
This kind of stratagem works well with other films which also have a tragic ending – one of my friends used to do just that with Titanic long ago. It is after all a very human reaction.
And yet, the paradox is that repeated viewings are also a way of understanding that death is forever. For a time, you try to escape from that truth, going back and back and back again to see the film, but, as the ending inevitably grows nearer, the idea of death slowly begins to sink in. Little by little, you begin to accept its inevitability.
I am convinced that RM is built of multiple layers of meaning and that we understand them differently, according to our age, our experience and our own losses. The seeming innocence of this little film hides unexpected depths. Critics who lightly dismissed the character of Tyler as a young, drfiting and tormented rebel only pitifully skimmed the surface. This is not what he really is. He is a grieving young man, a lost soul, unable to get over the devastating suicide of his brother. He was the one who found Michael after Michael hanged himself. Can anyone imagine the impact? Tyler is struggling to find a way to cope with the pain and grief – this is why we see him constantly scribbling away in his diary, talking to his dead brother. I’ve always thought we might have coined many other different titles for Remember Me. If I were to invent one, I would rename it Death and the Young Man. Another friend of mine came up with another title : An Unfinished Life.
Je laisse les mots de la fin à Robert, qui a su si bien capturer l’essence du film : «RM est un film qui vous brise le cœur, mais il vous fait aussi chaud au cœur».
I will let Robert himself utter the final words, which I’ve always thought defined so well the film: «Remember Me is heartbreaking, and heartwarming». It’s all there, in a nutshell.
Extraits des réponses et réactions sur le forum : (les filles, vous vous reconnaîtrez !)
Excerpts from commenters’ answers on the French forum (not translated)
What a wonderful post! To see Him again and again, the miracle of rewind. Then aim to see death coming, again and again. I must think this through. Somewhere else I talked about a great Alchemical Transformation Taking place Within the viewer, and I Will take this idea a year of transformation for Article I'm trying to write about RM. What do you think? We see, again and again, Loved life unfold, That red T-shirt inside out (Which, in this movie, something means clustering), Until ET stands by window and dies That There. He lives and dies over and over again and sometime in this spring must transform the viewer, must, while Accepting death, be reborn, In Some Manner. Survivors Have the hardest job, to go on, and yet how can THEY do this UNLESS Has Taken Some Transformation Within em up?
RépondreSupprimerThank @jessegirl for your wonderful coment - you're always so supportive of me! This particular theme, death in RM, seems to be really haunting people, it's been haunting me and I'd be mulling it over and over. And I will probably gon on broaching the theme, it's so rich even though it's so painful.
RépondreSupprimerBy the way, I think this idea of a year of transformation would be a fantastic subject for an article!
Merci pour la lecture de ce post passionnant et tellement pertinent pour mon cas. La première fois que j'ai vu RM, je suis restée "bloquée", je ne pouvais rien dire, rien écrire, rien analyser ou commenter concernant ce film. J'étais bouleversée, sous le choc, en un mot "muette" (ce qui est, pour ceux qui me connaissent, très rare). En fait, je n'avais qu'une envie, qu'une urgence presque, c'était de retourner le voir à tout prix, mais je ne saisissais pas le pourquoi du comment. Ce n'est qu'après avoir découvert l'explication développée dans ce post et me l'être en quelque sorte "appropriée", que j'ai compris pourquoi ce besoin impérieux de revoir ce film était en moi. Alors un grand merci de m'avoir permis d'y voir plus clair en moi...
RépondreSupprimertoujour aussi bien tes poste je suis une grande fan...Merci j'ai adoré les commentaire des filles de TF.
RépondreSupprimerMerci Elise et Carlie1105 de vos encouragements ! J'espère bientôt recommencer à publier des choses que nous avons partagées sur TF, c'est super.
RépondreSupprimerJ'ai bizarrement (en fait pas tant que ça) encore plus aimé Remember Me quand je l'ai vu la deuxième fois. On revit l'action, et connaissant la fin d'avance, on note les détails.
RépondreSupprimerC'est d'ailleurs assez étrange comme les spectateurs ne créent pas le lien entre le sous titre "dix ans plus tard" et le world trade center. Quand j'ai vu la première fois le film et alors que j'avais lu le script (chose que je regrette et en même temps pas totalement), j'ai été un peu effrayée voire déçue de voir les indications spatio-temporelles en début de film. Je me suis dit "tout le monde va deviner", mais en fait pas du tout: ma copine, puis ma mère n'ont rien vu venir du tout. Le film est construit de manière à ce que l'on ne pense jamais au 11 septembre: pas un film où toutes les 10 mins on entendrait "aujourd'hui c'est le 20 mai 2001, journée idéale pour aller au musée" ou encore "eh bien les vacances c'est fini, on est en fin août 2001" et je t'en passe encore des plus belles. D'ailleurs ça me fait réaliser à quel point l'intrigue du film (et donc ce que vivent les personnages)est placé hors du temps. On n'a jamais de références temporelles, à part au début du film, et quelques petits détails annodins comme quand Tyler va chercher Caroline à la sortie de l'école en lui disant "ça y est c'est les vacances!". Et d'ailleurs, la seule référence précise au temps, c'est la date inscrite au tableau de la salle de classe de Caroline, tout à la fin, quand le spectateur comprend le sort de Tyler.
Oh mon Dieu, je me suis perdue dans mon commentaire, lol, trop de choses à dire, alors oui réaction des spectateurs. Tiens d'ailleurs, petite anecdote: la deuxième fois que je suis partie voir le film, il y a deux jeunes filles et un garçon assez bruyants qui sont arrivés dans la salle au dernier moment. Ils parlaient et riaient fort tandis que le garçon étalait ses jambes sur le dossier du fauteuil d'en face. Eh bien, ils ont été emporté dans le film: ils n'ont plus parlé du tout, ils étaients concentrés, et à la fin du film en se relevant, ils avaient le même air grave et songeur que les autres spectateurs, alors le garçon a tenté de se rattraper avec une reflexion comique mais pourtant assez révélatrice de son état d'esprit "eh ben bonjour le film déprimant!" lool
Bon, ben je m'arrête à là, mais pour répondre à ta question: non je n'avais pas du tout remarquer pour le tee-shirt à l'envers! ^^
Bises
Merci beaucoup Sarah pour ton commentaire et super-contente que le blog te plaise ! J'ai constaté les mêmes choses que toi, pour les réactions des spectateurs, pour les reprères spatio-temporels.. quand j'ai vu le film pour la première fois, je savais déjà la fin car on me l'avait malheureusement révélée, mais je pense que si je n'avais rien su avant, je n'y aurais vu que de feu moi aussi. On est si captivé par les personnages qu'à la limite on fait l'impasse sur les repères de temps, qui restent comme tu dis très discrets... et n'hésite pas à commenter, il n'y en a jamais assez, pour moi c'est la cerise sur le gâteau de savoir que quelqu'un lit ce blog..
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